Diabète de type 1 : le rôle du thymus remis en cause

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Rédigé par Julie P. et publié le 9 mars 2018

Le diabète de type 1 (diabète insulino-dépendant) est provoqué par la destruction des cellules pancréatiques sécrétant l’insuline par le système de défense de l’organisme. Quel rôle joue exactement le thymus dans cette maladie auto-immune concernant 6% des cas de diabète ? C’est en se penchant à nouveau sur cette question, qu’une équipe de recherche de l’université Paris-Descartes et de l’Institut Cochin vient de découvrir que le thymus ne dysfonctionne pas spécifiquement chez les diabétiques de type 1 et que nous avons tous des cellules immunitaires aptes à détruire certaines cellules du pancréas. Focus sur cette étude offrant la perspective de nouvelles méthodes thérapeutiques.

thymus

Evolution du rôle du thymus dans le diabète de type 1

Le thymus est un organe du système immunitaire situé à l’arrière de la partie haute du sternum, l’équivalent de la base du cou. Il est qualifié d’organe lymphoïde primaire car il participe à la maturation d’un type de globules blancs nommés lymphocytes T (LT). Ces cellules sont responsables de l’immunité cellulaire c’est à dire qu’elles participent à la neutralisation et la destruction des cellules n’appartenant pas à l’organisme (le non soi) comme les cellules infectées par un virus, les bactéries, les cellules provenant d’une greffe d’un donneur (on parlera d’allogreffe) ou encore, des cellules cancéreuses.

À savoir ! Le thymus est constitué de deux lobes non symétriques. Il est le plus volumineux dans les premiers mois de la vie et finit par s’atrophier à partir de l’adolescence A ce moment, le thymus pèse environ 40 grammes. Au fil du temps, le tissu lymphoïde est remplacé par du tissus graisseux.

Ces LT naissent dans la moelle osseuse puis se dirigent vers le thymus pour devenir matures en se munissant de récepteurs cellulaires capables de reconnaitre des antigènes, les substances étrangères à l’organisme capable de déclencher une réponse immunitaire.

Avant de circuler dans le sang, ces LT subissent deux types de sélections :

  • L’une positive pour vérifier que leurs récepteurs sont capables de reconnaitre les antigènes du non soi ;
  • L’une négative pour vérifier qu’ils ne reconnaissent pas les antigènes du soi.

À savoir ! Notre organisme possède ses propres antigènes lui permettant d’avoir une  » Carte d’identité  » unique. Les antigènes du soi sont des molécules (protéines ou glucides) présente à la surface de nos cellules.

Avant cette étude, dirigée par Roberto Mallone de l’Institut Cochin, les chercheurs étaient persuadés que le thymus présentait aux lymphocytes LTCD8+ des fragments protéiques caractéristiques des cellules bêta pancréatiques et que la sélection altérée du thymus chez les individus atteints d’un diabète de type 1 provoquait la libération dans l’organisme d’une quantité importante de LTCD8+ programmés pour détruire les cellules du pancréas.

À savoir ! La cellule bêta du pancréas est un type de cellules constituant, à 80%, les îlots de Langherans situés à l’arrière du pancréas. Elles sont responsables de la production d’insuline, l’hormone hypoglycémiante. Les cellules alpha dans ces îlots sont, quant à elles, responsables de la production de glucagon, l’hormone hyperglycémiante.

À savoir ! Les lymphocytes LTCD8+ sont des lymphocytes portant le récepteur CD8. On les qualifie de lymphocytes cytotoxiques car ils détruisent les cellules infectées.

A contrario, chez les sujets sains, ces lymphocytes étaient retenus et éliminés par le thymus.

En comparant le nombre de LTCD8+ présents dans le sang d’individus atteints d’un diabète de type 1 avec d’autres individus non diabétiques, les chercheurs se sont aperçus qu’il n’y avait pas de différence.

Que conclure de cette observation?

Pour les chercheurs, nous sommes donc tous « auto-immuns » contre nos cellules bêta pancréatiques mais les mécanismes d’auto-immunité ne se développent pas systématiquement. De plus, ces lymphocytes épargnés par le thymus ne sont pas inutiles car ils sont aussi capables de reconnaitre des antigènes microbiens similaires à ceux des cellules bêta. On parlera notamment ici de reconnaissance croisée.

Comprendre le déclenchement de l’auto-immunité

Après avoir constaté ces similitudes entre diabétiques et non diabétiques, une question vient immédiatement à l’esprit : pourquoi ne sommes-nous pas tous diabétiques ?

Actuellement, les deux hypothèses étudiées sont :

  • L’intervention d’un lymphocyte T régulateur jouant le rôle de sentinelle ou un autre mécanisme permettant de garder les LTCD8+ sous contrôle chez les sujets sains ;
  • Une vulnérabilité des cellules bêta du pancréas chez les diabétiques entrainant leur élimination par les LTCD8+ ou leur auto-destruction.

Selon Roberto Mallone, chercheur INSERM à l’Institut Cochin (Paris) qui s’est confié dans un communiqué de presse du CNRS  » le prochain défi est de mieux comprendre les ingrédients qui transforment l’auto-immunité bénigne de Monsieur Tout-le-monde en diabète de type 1. Cela pourrait permettre de dépister la maladie à une étape très précoce, et de développer des thérapies pour faire revenir l’auto-immunité à son état bénin »

Julie P., Journaliste scientifique

– Diabète de type 1 : le rôle du thymus n’est pas celui que l’on croyait ! CNRS. Consulté le 6 mars 2018.